mercredi, mai 24, 2006

# Sac de billes # 1

Je marche dans la ville comme on marche sur la lune (je suppose), des pas légers et le rythme maladroit. Comme découvrir les jolies choses.

Je rentre chez moi comme on rentre dans un trou de souris, tout en vrac, le linge et les livres, des chaussettes par-ci, des papiers par-là, le cendrier qui déborde et la couette en boule, ça m’agace profondément mais l’ordre me dépasse, je ne m’y tiens pas, je me tiens au vent.

Je force les mots comme on tire les vers du nez, je reçois quelques bribes d’impressions et le clapet se referme. Sésame ouvre toi que je t’explique mon ici et maintenant, qu’il se délie gentiment sous mes doigts, qu’il dise que « ça va » avec des mots bien choisis et des tournures souriantes, mais il s’évapore dans le gris des nuages et rien ne sort plus que cette sensation de marcher sur un fil.















Tendu sur les piliers de mes angoisses il tient bon et ne s’embarrasse pas de questions inutiles, il reste droit et statique. Marcher sans regarder le vide et shooter dans un sac de billes. On verra bien.
Et puis avoir confiance en attendant le printemps…(parce que quand même il en met du temps) (lui)

samedi, mai 13, 2006

# Sac de filles # 4


Elle fait un signe de main au bus qui ralentit et qu’elle surveillait de loin. Elle avait déjà jeté un œil sur moi, je sentais que, mais j’avais les yeux trop embrouillés par le réveil aux aurores et le cœur ailleurs. 91 direction Montparnasse, j’entre. Elle aussi. « Vous voulez voir mon passe ? Je dois vous le montrer ? parce que là je suis …enfin avec mes paquets » « Merci, ça ira Madame » Elle lui sourit et vient s’asseoir sur le siège en face du mien, côté droit. Nous sommes les seules passagères. Je croise son regard et elle me parle en mangeant son beignet aux pommes : « J’ai découvert une boulangerie en bas de la rue…hum…vraiment délicieux ce qu’ils vendent » Moi sourire complice : « Ah oui je crois savoir laquelle c’est, il font le pain... » « oui au four… » « nil, là devant vous » « oui voilà ». Ses phrases complètent les miennes, elle sourit, encore, elle me dit qu’elle s’est levée trop tôt, une heure d’avance, elle s’en est aperçu car ça lui a semblé bizarre le peu de monde dans les rues, et puis elle fait les nuits habituellement alors elle est « toute décalée » quand elle fait les jours, elle n’arrive plus à dormir normalement, elle se réveille en sursaut et puis vraiment elle ne pourrait pas travailler dans cette boulangerie/pâtisserie parce qu’elle aurait envie de tout tellement…hein ? oui tellement c’est bon. Et je comprends. Et il faut qu’elle appuie sur le bouton d’alarme qui indique l’« arrêt demandé » parce que c’est là …déjà…qu’elle descend. Et c’est là aussi que je cesse de sourire, parce qu’elle s’en va, ce bout de femme à la peau ensoleillée, à la chaleur palpable, elle me souhaite une bonne journée et à bientôt peut-être.
Je pense : « c’était si facile de se parler sans se connaître, c’est pourtant si rare, c’est pourtant si bien ».
Il y a des soleils noirs qui pour quelques minutes font oublier les jours de pluie et rendent la vie juste un peu moins triste.